MALI

« Mohammed Ali ag Amoye, le frère d’Aïcha, m’accueille à Tombouctou. Il a affrété des camions pour ramener toutes les familles de son quartier de Bariz, réfugiées avec lui au Burkina Faso, au camp de Mentao. Les affaires sont au plus mal. La belle maison qu’il avait construite pour le "clan" Amoye a connu la guerre, au sens propre du terme. Femme, enfants, frères et sœurs ont fait escale à Bamako. Il faudra du temps avant qu’ils puissent retrouver la demeure familiale. Pour le moment, les caisses sont vides. Nous rejoignons Adda, le beau-frère de Mariam, déjà rencontré en son exil mauritanien. Avant les événements, Adda et Mohammed Ali s’étaient associés pour créer une agence de tourisme et un commerce de voitures... Aussi enjoués et habiles entrepreneurs l’un que l’autre. Ils ont tout perdu lors de leur exil.

"On pourrait ouvrir tous les deux un musée Titouan à Bariz, suggère Mohammed, vendre des affiches, des cartes postales aux touristes…

- Mais, Mohammed, regarde ! Je suis le seul visiteur étranger aujourd’hui à Tombouctou !", objecté-je. 

Des touristes venaient régulièrement au début des années 2000. Mais je ne suis pas le seul observateur convaincu que le climat ne sera pas propice à leur retour avant longtemps. Adda n’est pas mieux inspiré, mais il a trouvé un petit boulot. Il est vendeur chez l’un de ses parents qui tient un commerce. »

Extrait de Retour à Tombouctou, 2015, Éditions Gallimard